Chronique criminelle : Épisode N°7 — Soute interdite
Poétesse et juriste, autrice de “Succès boisés et autres plaidoiries poétiques”
Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d’une pure coïncidence.
Une brise marine
Je reprends mes pensées calmement… Il est 18h, l’air marin envahit peu à peu mes narines… Je respire… J’adore cette brise. Dans dix minutes, je monterai dans le bus pour rejoindre à nouveau la vieille dame dont je m’occupais auparavant. Le contrôleur nous fait passer un à un derrière le lecteur de billets. Nous sommes en pause dans une station-service à l’atmosphère romantiquement désolée, et j’ai froid ; mon short et mon débardeur ne suffisent pas.
La demande fatale
Je m’approche du contrôleur et lui demande si je peux aller chercher un plaid ou un pull-over dans la soute. Il sourit et me répond malicieusement : « Oui », avec un clin d’œil. Après avoir ouvert la porte gauche du bus, je grimpe parmi les bagages et m’affale dans la soute. Oups, mes affaires sont de l’autre côté. Ni une ni deux, je rampe de l’autre côté. Un bruit sourd retentit. Mince, c’est la porte qui vient de se refermer ! Et voilà que le bus redémarre en trombe ! Je suis coincée dans la soute. Comment vais-je m’en sortir ? La sensation est extrêmement désagréable. Vive Flixbus et l’espionnage ! Je suis vraiment enfermée ! La seule solution ? Frapper de toutes mes forces sur les parois du bus, quitte à faire trembler le véhicule.
La libération inespérée
Ne vous inquiétez pas, je ne suis pas Bonnie ; je ne veux pas faire trembler Clyde, je veux juste sortir de cette soute. Appeler la police ? Pas de réseau… Nous sommes perdus dans une contrée inconnue. Soudain, la porte s’ouvre à nouveau. La jeune fille qui voyageait avec moi a remarqué mon absence et le chauffeur est venu me libérer. Quelle chance… Merci le destin, merci Dieu. Je vais enfin pouvoir retrouver la vieille dame et mon amie.
Une mission sous couverture
Je suis sur la trace du Gang Tenebra. Ce soir, je serai logée chez eux… Je me suis infiltrée dans une des familles du gang. Ce sont des esclaves… En espionnant, j’ai découvert que leurs femmes sont enfermées chez eux, à peine vêtues. Ensuite, ils les prostituent et les changent régulièrement. J’ai dû pénétrer dans leur antre en portant un masque et une perruque. Ouf, ils ne m’ont pas reconnue. Pour l’instant, je reste. J’ai même réussi à m’immiscer chez un ancien escroc, un grand braqueur recherché par la police. Malheureusement pour lui, j’ai son adresse. Il est régulièrement menacé de mort, surveillé par la Tchéquie et employé par la Russie.
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Les secrets de la diplomatie
Cette mission, je l’ai obtenue grâce aux services diplomatiques ; je leur dois une fière chandelle. Ils me font entièrement confiance, et j’admire leur bienveillance. Au moins, c’est exotique ! Et un peu criminalistique aussi. En partant, toute trace de mon passage a été effacée. J’ai quitté les lieux avec ma perruque et mon sac, sans incidents.
Réflexions troublantes
Depuis cet événement, je suis convaincue que la criminalité peut tout changer, voire modifier l’humanité et l’éternité. Il est possible de les dissocier uniquement en accordant les peuples entre eux, d’où mon intérêt pour la diplomatie. Si les peuples se font autant la guerre, n’oublions pas les paroles de Nietzsche : nous arriverons à un confinement mondial, à une harmonie perfide, à une humanité ou au Covid ! La fameuse prophétie se réaliserait alors… ou se répéterait ! J’espère que nous saurons l’intercepter à temps. Veni, vidi, vici. Cependant, cela n’excuse pas le prurinationalisme mondial qui émerge aujourd’hui avec l’ensemble des conflits. Certaines disparitions sont orchestrées, et mon objectif est de les déjouer.
Le mystère du Gang Tenebra
Le Gang Tenebra sévit dans tout le pays. Les membres sont arrêtés petit à petit, mais ils sont souvent placés en semi-liberté. Les peines n’ont plus de sens, et les histoires d’amour non plus. Tout dysfonctionne, même ma passion qui bourdonne, et mon cœur qui raisonne. Le plus dangereux des membres est en liberté ; il prévoit de toucher deux autres victimes. En enquêtant, on comprend rapidement qu’une étudiante est visée, une conquête. Il voudrait tuer une femme, mais il n’arrive pas à passer à l’acte. Il est soutenu par deux greffiers mafieux, qui n’aiment pas les femmes non plus. Ensemble, ils choisissent leurs proies. Ils ont cependant été sanctionnés l’année dernière pour huit féminicides en cours de procédure. L’avocat qui les a défendus est également en prison pour usage de méthodes frauduleuses. Ils greffent leur cœur avec le mal pour aimer à contre-cœur, de façon déraisonnable.
Une cible obsessionnelle
Si l’on lit les plaintes et que l’on étudie les liens de connexité, plusieurs faits sont intéressants à comparer : la plupart des plaignants précisent qu’ils ne veulent plus vivre dans la peur, ne plus aimer dans la douleur, ne plus fuir avec horreur. L’ennemi N°1 de la nation se prénomme Alex ; il est fou, dangereux, naïf. C’est celui dont je vous parle depuis le début, celui qui est obsédé par moi au point de vouloir ma mort. Il est surveillé par drone tous les jours, et pourtant rien ne cesse : ni le carnage, ni le saccage. Grâce à cette surveillance, nous avons découvert que deux autres proies ont déjà été choisies par un de ses complices travaillant dans la police. C’est pourquoi, lors de la prochaine intervention avec la DGSI, c’est moi qui dirigerai l’opération. Je suis la pièce maîtresse de ce commando.
Le jeu du risque
Nous allons choisir une chèvre. Nous allons lui faire croire que cette femme est la prochaine victime. Cette femme, c’est moi. Et cette femme, c’est aussi la première victime. Comme Marie Trintignant, simplement et poétiquement, subrepticement. Pour des raisons stratégiques, nous avons gardé la même victime tout au long du jeu pour réduire les risques. Le jeu du risque est sous-jacent, le goût du risque est l’option. Principal bémol : il veut vraiment ma peau. Il ne l’aura pas, car je suis infiltrée depuis le début.
Dernières révélations
Nonobstant ces quelques informations, il convient tout de même de souligner que sans cette affreuse mascarade, cet individu aurait sans doute multiplié ses victimes. Nous avons donc limité son taux de criminalité (ou de psychopathie). Pourtant, le crime n’est pas toujours un phénomène individuel. Le crime est souvent organisé. Par conséquent, il est irresponsable de laisser cet homme armé en liberté, car d’autres prendront exemple sur lui et ces crimes se répéteront. La psychopathie se soigne ; le crime s’anticipe.
La prochaine étape
La prochaine étape de la mission sera donc de savoir si les autres membres de son gang (à part les membres fondateurs) sont également proches de lui au point de partager sa psychopathie.
L’espionnage par drone nous aidera ensuite à réduire la propagation de ce crime, et de ce fléau, face auxquels je reste sans mots.
Depuis plus de cinq ans, l’enquête est menée.
Je mène la danse et l’enquête, avec hypnose, avec osmose devant ton être qui frissonne, et tes yeux plongés dans la mélancolie.
Judith Ruth Brunel
Juriste
À propos de moi, Judith Ruth Brunel :
Née le 5 janvier 1998 à Lyon, je suis une juriste passionnée par les sciences criminelles. Mon premier livre « Succès boisés et autres plaidoiries poétiques » représente pour moi une fusion unique entre la rigueur de la logique juridique et la délicatesse de la #poésie.